mercredi 18 novembre 2015

Vivre heureux.

Des gens heureux. Leur unique tort serait-il d'avoir été heureux, ou du moins d'en avoir l'air ?
Le lendemain du massacre, ce sont beaucoup de sourires qui se sont succédés à la télé, sur les réseaux sociaux, des sourires des victimes disparues.
Des massacres, des sourires : dit comme ça et vu comme ça, il y a bien quelque chose qui cloche, rien ne se tient, c'est insensé.
Véronique, Guillaume, Anna, Marion, Marie ou encore Mathias. 
La liste est tellement longue, trop longue, trop de sourires, trop de vies brisées.
Des vies brisées, un peuple brisé, un monde brisé.
Les hommages, les bougies, les minutes de silence, les mots, rien qui ne puisse alléger la souffrance plus ou moins forte qui touche chacun de nous.
Ici, on ne pense plus. Abasourdis et hagards de tant de non-sens, de tant d'amour volé en éclats. On réagit à peine. On a vu ces sourires mais on a vu aussi ces horribles scènes qu'on dirait sorties d'une fiction de cinéma. On a vu, nos yeux se mouillent de temps à autre, quand la coupe est devenue un peu trop pleine. 

Du mutisme aussi. Entre nous, on parle un peu moins. En général, on se tait depuis, on se met dans une bulle. Sauf avec les enfants qui doivent se construire dans un monde encore bien trop grand pour eux, un monde qu'il est aujourd'hui difficile de leur expliquer. On tente de les préserver, on met de la musique au lieu d'allumer la télé, on allume une bougie tous les soirs depuis samedi pour avoir cette flamme qui danse.
Il n'empêche que lundi en fin de matinée, la maîtresse de notre petite de quatre ans m'a contacté pour savoir si j'allais bien, savoir ce qu'il s'était passé. Notre petite allait voir les adultes à l'école pour leur dire que "ma maman, elle va mourir, et quand je vais rentrer, je n'aurai plus de maman". J'ai eu un accident de voiture lundi matin tôt. Je suis rentrée à la maison, avant le départ des enfants à l'école, sauve mais triste, avec des larmes. On a expliqué aux enfants que tout allait bien mais la réaction de notre petite fille à l'école prouve bien l'impact que les événements du week-end ont provoqué, bien malgré nous, sur nos enfants. 

Il  y a eu le 7 janvier 2015. Il y a le 13 novembre 2015. Il y aura l'après, cet après qui bouleversera nécessairement chacun de nous.
Il y aura cet après qui nous souffle de continuer, qui nous souffle que tant d'amour l'emportera sur tant de barbarie. 
Je comprends pourtant bien ce petit garçon qui disait que "les fleurs ça fait rien face aux pistolets des méchants". Je comprends aussi qu'on a les fleurs, les bougies et tant de gens qui se rassemblent encore plus. Je ne comprendrai jamais certaines réflexions mais aujourd'hui, bien m'en fasse, elles coulent sur moi comme peuvent couler les larmes : face à la barbarie, il n'y a bien que pour seule réponse de continuer de vivre, de vivre le plus heureux possible, comme un écho à tous ces sourires tombés le 13 novembre dernier mais bien ancrés à jamais dans nos cœurs pour continuer d'avancer.
Les fleurs, les bougies, les sourires, pour vivre heureux, encore.
Les pistolets, pour quoi faire ?

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